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Place Assise Non Numérotée
13 mai 2011

Charité Bien Ordonnée...

chuckyParfois, je me résous à faire des trucs de mère de famille. Comme par exemple me porter volontaire pour accompagner une sortie scolaire. Si si. Bon, en fait, ça m'est arrivé deux fois (faut pas déconner non plus, c'est pas parce qu'on a vêlé qu'on a forcément le goût du sacrifice et de l'abnégation) : une visite au Louvre (c'était l'ho-rreur ! J'ai absolument rien vu, j'ai passé mon temps à compter et recompter les gamins de "mon" groupe, obnubilée par l'idée d'en paumer un), et une visite à Thoiry (c'était l'ho-rreur ! On a passé des heures enfermés dans le car, sans pouvoir fumer, à rêver de jeter par inadvertance les gamins les plus bruyants - dont le mien faisait partie, d'ailleurs - dans la mare aux hippopotames !).

Outre un malocrâne tenace et une sorte d'admiration pour les enseignants de tous poils, même les plus mauvais (ce qui ne m'empêche pas cependant de maudire à tout jamais Monsieur S., grâce auquel j'ai passé à peu près toute mon année de CM1 "au coin", à lire et relire la Déclaration universelle des Droits de l'Homme), j'ai rapporté de ces sorties la joyeuse conviction que spontanément, un enfant partage. Il suffit d'observer un troupeau d'élèves (en l'occurrence, c'était des classes de CE2, donc des enfants entre 8 et 9 ans) au moment du pique-nique pour constater que les sandouiches et les poignées de chips passent de main en main, sans marchandage ni contrepartie.

couv2287_49f05ac7c2dbdDe là à penser que le yak-magueule et le cénoukonpaye relèvent de l'acquis, il n'y a qu'un pas que je franchirai allègrement. Car franchement, où irait-on si les enfants devenus grands continuaient à partager leur déjeuner ?

Pourtant, c'est justement ça que je me plais à imaginer. Des anciens enfants devenus grands ("adultes", c'est limite péjoratif, non ? On entend "responsabilités", "obligations", "crédit sur vingt  ou trente ans", tout ça...), qui se soucieraient plus de partager équitablement les ressources que d'amasser en se répétant que ce sera toujours ça que "les Autres" n'auront pas.

Alors forcément, ça me fait un peu bugger de lire ce matin que, selon un sondage OpinionWay pour Le Figaro, 67% des Français - qu'ils soient de droite ou de gauche - sont favorables à l'idée d'imposer des contreparties aux bénéficiaires du Revenu de Solidarité Active. Mieux, ils sont 70% à trouver que oui oui, c'est une bonne idée que ces salauds de pauvres consacrent, en contrepartie de leur allocation, 5 heures de service social par semaine au sein d'une collectivité ou d'une association. (Libération a le bon goût d'ajouter entre parenthèse que les contreparties existent déjà actuellement. À moins qu'en copiant-collant la dépêche AFP, on ait tout bêtement oublié de supprimer cette parenthèse...)

En fait, est-ce qu'on ne serait pas en train d'inventer un nouveau concept de solidarité, où l'on exigerait des "bénéficiaires du RSA" qu'ils se montrent solidaires de tous ces pauvres salariés qui en bavent pour garder leur emploi et rembourser leur(s) crédit(s) ? Est-ce qu'on peut encore décemment parler de solidarité quand on oblige les plus pauvres d'entre nous à s'aplatir toujours davantage et dire humblement merci pour les allocations qu'on veut bien leur verser sous conditions ? Est-ce qu'on est encore de gauche quand on s'abaisse à utiliser le terme de "bénéficiaire" pour parler de quelqu'un qui survit sous le seuil de pauvreté ?

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