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Place Assise Non Numérotée
8 novembre 2007

Winston's blues

Jusqu'où peuvent-ils aller sans que personne ne bronche ?

Où se situe la limite entre l'acceptable et l'inacceptable ? Sera-t-elle au même endroit demain ? Et la semaine prochaine ? Et dans quatre ans et demi ?

On vit tous comme si nos droits étaient acquis une bonne fois pour toute, et que rien ni personne ne pouvait nous les retirer. Pourtant, ça fait des années que nos droits sont grignotés comme des biscuits. Droit du travail. Droit de grève. Droit à l'assurance chômage, à l'assurance maladie. Droit aux allocations. Droit de circuler librement et droit au respect de la vie privée (je pense aux caméras de vidéosurveillance qui ont fleuri un peu partout dans les centres villes, là).

On nous a enfoncé dans le crâne que ceux qui n'ont rien à se reprocher n'ont rien à craindre. Qu'il est regrettable, certes, mais indispensable de faire des concessions. Moins de sécurité sociale pour conserver la sécurité sociale. Moins d'augmentation de salaire pour pouvoir continuer à travailler. Moins de services publics pour conserver les services publics. On peut continuer longtemps comme ça...

Il n'y a pas si longtemps encore, je voulais bien croire que ma perception du monde n'était due qu'à une sorte d'hyperpolitisation, ou à une tendance trop marquée à faire des liens, ou à un gauchisme incurable. Appelez ça comme vous voudrez. Certaines fois, j'ai même concédé que peut-être, je poussais un peu loin.

Mais ce matin, en lisant sur le blog NRV qu'un médecin responsable syndical avait été convoqué par le préfet de l'Isère, qui lui a agité sous le nez des copies de mails qu'il avait échangé avec le porte-parole des urgentistes, Patrick Pelloux, je me suis demandé si c'était bien raisonnable de chaque fois se raccrocher au leitmotiv "on est en démocratie... on est encore en démocratie... on est quand même en démocratie...".

La démocratie ne nous protège de rien. C'est juste une organisation politique. Un cadre.

Il y a deux jours, j'ai regardé Mémoire d'un saccage (Argentine, le hold-up du siècle), de Fernando Solanas. Ce film, dédié par son réalisateur "à tous ceux qui résistent avec dignité et courage", retrace les différentes étapes qui ont conduit à l'effrondrement économique et social de l'Argentine. Jusqu'au soulèvement populaire de décembre 2001. Le pillage de ce pays a été organisé dé-mo-cra-ti-que-ment. Ce n'est pas la dictature militaire qui a saccagé l'Argentine ; ce sont des hommes élus par le peuple lui-même. (Ca ne veut évidemment pas dire que la démocratie ou la dictature, c'est la même chose.)


Pour en savoir plus sur la convocation du médecin par le préfet

Intrusion(s), de Sébastien Fontenelle
Le préfet de l'Isère lit vos mails..., Libertés Internets
Police politique : un préfet..., Le Post

Pour en savoir plus sur Mémoire d'un saccage

De l'utilité du cinéma pour l'histoire : Mémoire d'un saccage, Fluctuat.net

Et pour les malheureux qui auraient encore un moral d'acier

Rafle à la sortie d'une école bilingue, RESF
Un bébé sans-papiers en garde-à-vue pendant 9 heures, Nouvel Obs

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Commentaires
F
@ Deudeu : oui, plus ça se répète (sans que personne ne relève, ou presque), plus il y a de quoi baliser. Et au fait... Ne pas dire "expulsions", mais "éloignements" (18600 depuis le début de l'année).<br /> <br /> @ Kiki : le samedi, c'est Yo-Day ? Franchement, il n'y a aucune raison d'être désolée. Moi, c'est plutôt les gens qui s'acharnent à dire que tout va bien, ou du moins pas si mal, qui commencent à me déprimer sévère ;-)<br /> <br /> Bises !
P
association d'idée, je repense à je ne sais plus qui entendu à la radio qui disait que l'augmentation de l'essence allait forcer les gens à utiliser d'autres énergies. ben, ça m'a tué. C'est diablement méprisant comme façon de voir les gens. Un peu comme ces montreurs de chiens au cirque qui les font se dresser sur leurs pattes arrières pour une friandise. Enfin, ça n'a pas vraiment de rapport, mais je trouve ça triste. J'ai entendu aussi dire que les grèves dans les transports étaient dues aux égoïsmes de chacun, le tout pour ma pomme des revendicateurs, les méfaits de l'individualisme au centre de tout... Egoïstes. Alors j'ai pensé que pour ceux qui disent ça, "l'égoïsme, c'est quand on ne pense pas à moi". Ou comment reprocher aux autres ce qu'on fait soi-même sans complexe.<br /> Eh, ben voilà. Désolée d'utiliser ton blog comme déversoir de pessimisme. C'est parce que c'est vendredi, on va dire ? Demain, je reviens commenter Yo avec énergie Yo tous unis Yo.<br /> Bises et bonne journée !<br /> Kiki
2
Ce qui est très inquiétant, ce que ce qu'on prenait pour des coups de tête isolés se multiplient, et que la répétition semble dénoter une tendance générale.<br /> La même chose se retrouve avec l'immigration, ou plutôt les expulsions qui deviennent de plus en plus systématiques...
F
@ Tidoigts : tu laisses toujours des commentaires positifs, ça force mon admiration :-)<br /> <br /> Pour les Ogres, c'était déjà grave que le maire d'Oyonnax (si je me souviens bien) se permette de leur écrire suite à des plaintes de ses administrés qui avaient assisté au concert... Mais là, c'est pire, à mon avis : non seulement on a violé le secret de la correspondance, mais en plus, on se permet de convoquer le médecin et de lui agiter des copies de cette correspondance sous le nez ! Je ne sais pas si on peut faire plus décomplexé que ça...<br /> <br /> @ Jihelpe : entièrement d'accord avec toi ! Cet argument (rien à se reprocher, rien à craindre) est un de ceux qui me font le plus peur, actuellement. Peut-être qu'il est répandu bien au-delà des seuls sarkozystes... Et parce qu'on peut à peu près tout accepter en "raisonnant" comme ça...<br /> <br /> Bises à vous deux (et aux autres) !
J
Par rapport à cet argument entendu tous les jours sur ceux qui n'ont rien à se reprocher...<br /> Bien sur que ceux qui n'ont rien à se reprocher n'ont rien à craindre... Mais qui décide de ce qui est à reprocher ????<br /> Un sbire de Videla (ancien dictateur), en Argentine, avait dit : "Nous tuerons tous les opposants au régime, nous tuerons tous les sympathisants des opposants au régime et nous tuerons tous les tièdes..."<br /> Car l'acceptation ne leur suffit pas, il leur faut l'adhésion.<br /> Alors on risque d'être nombreux à avoir quelques chose à se reprocher...
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