Relevons la tête ! Levons le poing !

Aujourd'hui, j'ai racheté du sent-bon. Ca faisait à peu près six mois que je n'en avais plus, et que je vivais très bien sans, à vrai dire ; et d'un seul coup d'un seul (comme disait une collègue picarde, du temps où j'étais intérimaire dans une filiale d'Exxon Mobil), ça m'est devenu insupportable. J'y vois une preuve supplémentaire de mon vieillissement : quand j'avais vingt ans, ça me semblait un truc de vieilles de se parfumer tous les jours ! Ma grand-mère (qui a voté Bayrou au premier tour, parce que son mari, qui a toujours voté pour les communistes, est mort il y a deux ans, et que ben, du coup, elle n'a plus vu aucune raison de voter pour les communistes. Mémé, à qui personne n'a osé demander ce qu'elle avait voté au second tour, fait-elle partie des 53 % ? Sachant que 75 % des plus de 75 ans ont voté pour Nicolas Sarkozy, et que Mémé a toujours eu un faible pour Mireille Mathieu, j'avoue : j'ai un affreux doute...), ma grand-mère - disais-je - ne mettait jamais le nez hors de chez elle sans sa goutte de Guerlain (derrière les oreilles, hein, pas dans les cheveux, parce qu'il faut bien le dire : ma grand-mère n'a pas grand chose en commun avec Brigitte Bardot, sauf peut-être des idées peu recommandables sur les z'immigrés, mais ça, on a vu dimanche soir qu'en fait, il n'y a que les gens un peu obtus pour s'en offusquer, puisque la majorité pense à peu près comme elle. Vox populi, tout ça...).
Pour acheter du sent-bon, je me suis rendue au centre commercial de Parly 2. Grosse, très très grosse erreur ! Pas encore remise de l'uppercut dé-mo-cra-tique que j'ai reçu en pleine figure hier soir, j'ai pénétré dans ce temple de la consommation par l'entrée Concorde (ce qui n'a pas manqué de faire ricaner Monsieur-je-suis-tombé-dans-la-Fosse-aux-Dames) et je me suis retrouvée au beau milieu des sarkozystes ! Compte tenu du score obtenu par le nouveau Président dans le coin, je peux dire sans exagérer que sur dix personnes croisées, sept au moins avaient voté pour lui. L'horreur ! J'ai réalisé avec angoisse que j'étais en pleine crise de misanthropie aigue, allant même jusqu'à remettre en question le bien-fondé du système démocratique, quand tant de citoyens se sont laissés décérébrer par la télévision, jugeant que regarder la Star Ac' après une dure journée de labeur, ça détend plus que de regarder Arte ou même que d'ouvrir un bouquin. J'ai repensé à mes petites camarades de lycée, puis de fac, qui me disaient que je me prenais trop la tête comme fille, que je réfléchissais trop, que quand j'aurai un boulot, un mari, des enfants, des responsabilités, je verrai, je changerai d'avis, je serai bien obligée. Forcée de lire moins, de moins penser à la politique, de moins me prendre la tête avec des questions de sale intello. Eh bien, ce soir, je me dis que j'ai eu raison de leur soutenir que non, elles se trompaient. Que les responsabilités ne me feraient pas changer d'avis. Que la culture sous toutes ses formes, c'est important. Que se poser des questions, c'est primordial. Trente ans, trois enfants, un boulot et des emmerdes n'y ont rien changé et n'y changeront jamais rien. C'est vrai que, quand on travaille et qu'on a des enfants, on a moins le temps de lire. Mais on lit quand même. On va quand même au ciné, au musée, aux manifs, si on est convaincu que c'est essentiel ! L'obligation de sombrer dans l'humour graveleux d'un Bigard, ou de se vautrer devant la télé retransmettant un concert de Johnny n'existe pas ! La servitude volontaire, par contre, si !
Il faudrait trouver un moyen de rappeler (ou de faire savoir) aux électeurs de Sarkozy qui ne vivent pas à Neuilly sur Seine ou à Versailles (c'est-à-dire l'immense majorité d'entre eux) que le pouvoir a toujours intérêt à maintenir le plus grand nombre dans l'ignorance (le clergé conserva ainsi des siècles durant son pouvoir en profitant de l'illéttrisme et de l'ignorance de la populasse, et les faisant perdurer). Que mépriser la culture sous toutes ses formes, comme on nous y invite à grand renfort d'émissions à la con, c'est accepter d'être asservi par des gens qui eux ne la méprisent pas, mais au contraire, se l'approprient exclusivement.

Comments

[filaplomb]

Les frites au four, on croirait une contrepéterie.

Jérémy Kissling n'est donc pas un chanteur inconnu, ça me réjouit ! :-)

[étant un peu ours moi même, j'aime assez le chanteur suisse !].

[jsham]

n'oublions pas notre Johnny Nazional!
Je vous invite d'ailleurs à écouter une interview extraordinaire de notre sarkozyste ! sur www.encore1blog.canalblog.com !

ps: les frites sont au four ! je repete les frites sont au four !!!!!!

[Flo Py]

Merci, c'est très gentil d'essayer de me rassurer :-)
Je me fais plutôt bien à l'idée d'être une paria et je vais continuer à écouter Bénabar, Thomas Fersen, Loïc Lantoine, Agnès Bihl, Jean Guidoni, Jérémy Kisling et les autres ! Y a trois héritiers à éduquer musicalement et politiquement !
Bises.

[filaplomb]

Oui, car la France de Sarkozy, c'est aussi le retour d'Enrico Mathias et de Mireille Mathieu. Vive les Marithie et Gilbert Carpentier.
A bas Bénabar, Dyonisos et Cali (ah mais Cali je l'aime pas de toute façon !).

A Toulouse, où Ségolène fut élue hier soir à 54 et quelques pour cent, dans le métro, 22 personnes faisaient la gueule pendant que 2 seulement souraiaient.
Mais, pour te rassurer, même ces deux là étaient insupportables ! :-)


[Jolie photo… :-) ]