A.D.N. : Assez De Nicolas (slogan entendu à la manif du 20 octobre)
Brice Hortefeux frétille (c'est un spectacle quasi insoutenable) : sa loi est passée. Presque les doigts dans le nez, en fin de comptes, et ses détracteurs s'en remettent désormais au Conseil Constitutionnel.
Les opposants à Nicolas Sarkozy, ou plutôt à sa politique, parce que lui, dans le fond, on s'en contrefout, ne sont plus les seuls à s'inquiéter : à l'étranger aussi, on s'interroge (enfin, peut-être pas en Suisse...).
Mais c'est pas vraiment de ça dont j'ai envie de causer aujourd'hui. Ou plutôt si, mais en parlant de gens d'ici. Des gens qui ont - probablement - voté pour Nicolas Sarkozy, il y a à peine cinq mois et demi, et qui eux-mêmes commencent à se demander si, par hasard, ils n'auraient pas fait une boulette.
Hier soir, une copine a téléphoné.
En soi, ce n'est pas un évènement.
Sauf que.
Ma copine est de droite. Ou plutôt, ma copine est une bourgeoise parisienne du 17ème arrondissement de Paris (beaucoup plus près de la place des Ternes que de celle de Clichy), catholique pratiquante, elle n'a sans doute jamais songé à voter pour un autre parti que celui de la droite classique (que représentait Jacques Chirac, en son temps, qui - je le rappelle - a été maire de Paris pendant trèèèès longtemps). En fait, elle est tellement de droite que je n'ai pas osé lui demander ce qu'elle avait voté au deuxième tour des présidentielles. J'avais trop peur de la réponse...
Ma copine de droite, donc - que nous appellerons Mafalda, simplement parce que j'avais envie de mettre une Mafalda dans ce billet - est en recherche d'emploi. Chômeuse, quoi. Indemnisée par les Assedic (précision utile, puisqu'il existe des chômeurs non indemnisés), et dans une situation très particulière, que je ne prendrai pas le temps de détailler ici.
La semaine dernière, Mafalda s'est rendue à l'ANPE de sa ville pour la première fois (elle vient de déménager). Et a été atterrée par l'accueil qu'on lui a réservé. Elle a, en vérité, toutes les raisons d'être choquée : la conseillère qui l'a reçue lui a carrément demandé comment ça se faisait qu'elle était sans travail depuis plusieurs mois, sans même s'enquérir de sa situation (qui, je le rappelle bien que ce soit le cas d'un peu tout le monde, a des spécificités), et l'a ouvertement incitée à trouver un "travail alimentaire".
Bref, Mafalda vient de se prendre la réalité en pleine figure : on traite TOUS les demandeurs d'emploi comme des fraudeurs en puissance, des parasites, des nuisibles, des fainéants. Cette réalité, régulièrement décrite des gens comme Agnès Maillard ou Daniel Mermet (pour n'en citer que deux), Mafalda ne s'en était jamais franchement préoccupée auparavant : pour quoi faire, puisqu'elle n'y était pas confrontée ?
Je crois que ça l'a vaguement angoissée, cette plongée en apnée dans le monde réel, et je n'ai pas cherché à la rassurer (je déteste mentir, et plus encore, mentir aux gens que j'aime).
Je lui ai raconté les tristes méthodes de l'ANPE pour radier les chômeurs. Les directives contradictoires grâce auxquelles plus personne ne sait ce qu'il faut faire. Les "démissions" de directeurs d'agence pour l'emploi et de conseillers. Tous ces trucs dont elle n'avait pas envie d'entendre parler avant les élections, parce que "la politique, ça ne l'intéresse pas". Ou pas plus que ça.
La conclusion (enfin, c'est la mienne ; ça n'engage que moi), c'est qu'ils ont raison, les gens comme Françoise : il faut expliquer et expliquer encore autour de nous le programme de Nicolas Sarkozy. Amener les gens à établir un lien entre les propos que tient Sarkozy, et la façon dont ils sont reçus à l'ANPE, ou à la CAF, ou aux ASSEDIC. Ou encore entre la lettre du Président aux éducateurs, et un certain durcissement de la notion de discipline dans les écoles. En fait, il s'agit de réapprendre ce qu'est la politique.
Bon, le problème, en ce qui me concerne (et en lisant le commentaire que Kiki a laissé chez Le Yéti aujourd'hui, je me dis que je suis loin d'être la seule), c'est qu'avant d'être capable de tout ça, il faut lutter bec et ongles contre un affreux sentiment de tristesse et de découragement... Et ensuite, il faut être capable d'une patience qui parfois me fait défaut... Bref, y a du boulot !
PS : Désolée, j'ai été un peu longuette, sur ce coup-là. C'est que j'en ai gros sur la patate...